2017. Dans le port de Gabtoli, aux abords de Dhaka, des milliers de travailleurs journaliers arrachent aux ventres des bateaux des montagnes de sable, graviers, ciment, briques et charbon. Matériaux qui seront aussitôt engloutis par l’appétit insatiable de la ville. Vu de loin, le site ressemble à une fourmilière, des files de dockers emportent des paniers pleins tandis que dans le sens inverse défilent ceux qui se sont délestés de leur fardeau. Ballet incessant… A chaque rotation, le porteur reçoit un jeton qu’il ne faut surtout pas perdre tant que le bateau n’est pas entièrement libéré de son fret. Le salaire est proportionnel au nombre de jetons récoltés, de 2 à 5 Takas par jeton, selon la distance parcouru et le poids transporté. En cette fin 2017, il faut près de 100 Takas pour 1 Euro… Les charges pèsent entre 25 et 40 kg, 50 kg pour les sacs de ciment. Une personne peut ainsi gagner de 5 à 8 Euros par jour au prix d’efforts démesurés. Ce revenu est supérieur à celui de bien des emplois sans qualification au Bangladesh, mais la tâche est particulièrement usante et parfois dangereuse. Cette activité épuisante ne peut être que temporaire dans une vie, ou n’être exercée qu’ à certaines périodes de l’année, quand par exemple, les travaux des champs laissent un peu de répit. Ces tâcherons sont recrutés dès l’aube. Certains dorment sur place, sous des abris de fortune pour être certains d’être à pied d’œuvre aux premières lueurs du jour. Il n’y aura pas de place pour tous. Durant la nuit, les barges sont arrivées, pleines jusqu’à la « gueule », la ligne de flottaison largement dépassée, prêtes à sombrer dans les eaux troubles du Buriganga… Cette série de photographies a été réalisée avec l’aide et le soutien de l’ONG Bangladaise « GK » (Gonoshathaya Kendra).